La buse variable, une majestueuse sentinelle
Hiératique, la buse perchée guette les proies du bord des routes longeant des prés. C’est à peine si elle regarde les automobiles, indifférente à la circulation. Mais si un mouvement attire son attention entre les herbes, elle s’élance et décolle d’un vol lourd pour aller s’abattre sur la proie. Un peu plus loin sur la route, une autre buse veille, isolée, car ce grand oiseau, très répandu dans nos campagnes, chasse toujours seul.
Les silhouettes massives des buses hantent les paysages hivernaux des plaines boisées, des bocages, des landes, des plateaux peu élevés. Des oiseaux venus du nord renforcent alors les populations sédentaires. Immobiles sur leurs perchoirs, dans le vent et le froid, elles guettent de rares proies et doivent parfois se passer de manger, quand la neige recouvre les champs. Un enneigement persistant les oblige à fuir vers le sud, ou à s’approcher des habitations. C’est la saison où elles chassent à l’occasion les oiseaux. Même en hiver, les buses ne s’éloignent guère des bois, qu’elles regagnent à la tombée du jour pour y passer la nuit. Dès que février annonce un redoux encore fragile, les hivernants repartent vers le nord, tandis que les couples sédentaires se forment ou renouent.
Tout au long de l’année, mais particulièrement de février à juin, puis de fin août à septembre, les mâles adultes accomplissent de longs survols en cercle au-dessus de leur territoire, à haute altitude. Lorsqu’une buse fait sa ronde, portée par les courants aériens qui allègent l’effort de ses ailes, d’autres buses voisines ne tardent pas à en faire autant, et la démonstration peur tourner à la querelle aux frontières des territoires, avec force cris et poursuites.
Dès février, c’est le couple qui tourne ainsi au-dessus des bois, la femelle suivant le mâle ou le croisant sans fin dans un ballet aérien en spirale qui peut durer une heure, ponctué d’appels sonores, de loopings, de chutes par paliers ou en piqué et de fausses alertes. Le mâle y déploie un art du vol spectaculaire. Fréquents en mars et avril, ces rituels amoureux en plein ciel se prolongent tout au long de la saison de reproduction, et renforcent les liens du couple.
Le mâle et la femelle construisent ensemble une aire assez vaste, formée d’un amas de branchettes supportant une coupe faite d’herbes sèches, ramilles, lambeaux, d’écorces, mousse et lichens. L’ensemble est perché entre 8 et 20 mètres de haut. Durant la construction, la course se poursuit avec offrandes de nourriture à la femelle, miaulements, rondes aériennes et accouplements sur les branches voisines.
Puis le silence s’instaure ; quand la femelle commence à pondre. Elle couve seule ses 2 ou 3 œufs, nourrie par le mâle qui lui apporte des proies. Après l’éclosion, la femelle ne s’éloigne guère du nid durant les trois premières semaines, car les jeunes sont vulnérables au froid, à l’humidité. Le mâle apporte des proies, que la mère transmet au bec vorace de ses petits. Si la nourriture se fait rare, il est fréquent que le poussin le plus gros mange le plus chétif.
À trois semaines, les jeunes appellent les parents du bord du nid, et dépècent eux-mêmes les proies. Après des jours de bousculades, sauts et battements d’ailes impatients, ils prennent leur envol à un mois et demi. C’est alors le début de l’été, période où les petits mammifères prolixes sont faciles à chasser dans les herbes sèches… Durant six à huit semaines encore, les jeunes seront nourris par les parents. Le groupe familial reste uni souvent jusqu’en septembre.
Pour les migrateurs de Scandinavie, c’est le moment de partir vers le sud, souvent en petits groupes lâches. Un beau jour, se laissant porter par un courant chaud, les buses s’élèvent en cercle, puis se laisse glisser vers le sud-ouest. Les buses ne nichent qu’à partir de leur troisième année, souvent à proximité du lieu de leur naissance. Elles peuvent vivre jusqu’à 25 ans.
C’est à l’affût que la buse chasse, préférant les proies capturées au sol, principalement les petits mammifères actifs le jour. Perchée sur quelque piquet ou autre promontoire, ou bien survolant lentement un pré, à environ 100 mètres de hauteur, elle repère le moindre mouvement grâce à sa vue perçante. Elle se laisse alors tomber sur le sol et capture la proie. La taupe affairée sous la terre, trahie par les remuements qu’elle provoque en surface, sera délogée de sa taupinière.
En hiver, le campagnol ou le mulot déambulant sous la neige sera débusqué de même. Au début du printemps, dans les herbes hautes, la buse chasse parfois à pied : elle marche posément piquant ici et là un ver de terre ou une sauterelle, une grenouille…
- Nom commun : buse variable
- Nom scientifique : Buteo bueo
- Ordre : Accipitriformes
- Famille : Accipitridés
- Taille : mâle 50 cm , femelle 57 cm .
- Envergure : de 118 à 140 cm
- Poids : de 500 g à 1 kg pour le mâle, de 400 à 1.3 kg pour la femelle.
- Nombre d’espèces : près de 90 espèces dans le monde, mais 3 en Europe : la buse pattue est présente au nord, et la buse féroce à l’est du continent.
- Habitat : bosquets, bois, forêts, bocages, toujours à proximité de milieux ouverts où elle trouve ses proies. Oiseau de plaine, absent au-dessus de 1000 mètres d’altitude.
- Régime alimentaire : petits mammifères (campagnols, taupes, lapins), charognes, quelques oiseaux, lézards, grenouilles, insectes et vers.
- Reproduction : dans une aire imposante faite de branchettes, calée à la fourche d’un arbre ou dans l’anfractuosité d’une paroi rocheuses. Ponte en avril, 2 ou 3 œufs couvés durant 36 jours. Jeunes élevés par les deux parents, envol à 1 mois et demi.
- Observation : facile, oiseau en vol plané ou perché à l’affût. Pour l’identification, attention aux variations du plumage.
- Distribution : présente dans toute l’Europe et au-delà sur le continent eurasiatique.