L’hirondelle rustique, compagne des beaux jours

Contrairement à l’adage, les hirondelles n’annoncent pas le printemps : elles le suivent. Leur arrivée est le signe que la température propice aux insectes, environ 10°C, est bien installée. Par une belle matinée vers la fin mars, un gazouillis retentit en l’air : voici la première hirondelle, glissant comme une flèche vers le ciel. Bientôt, elle va égayer les environs de son chant ronronnant et doux, roulant des trilles quand elle est perchée, zézayant constamment lors de ses allées et venues. Durant toute la belle saison, ce chant devient familier dans la campagne sillonnée par les hirondelles.

Le retour au nid
Ces grandes voyageuses, ne sont attachées qu’à un seul lieu ; le nid qu’elles ont bâti. Elles s’installent de préférence dans les écuries, les étables, les granges que la présence des animaux réchauffe au début du printemps, mais aussi des hangar ou das bâtiments ouverts. Voici comment se déroule la première installation du couple : le jeune mâle repère l’emplacement du nid. Puis il se lance à la conquête de sa belle. Il chante alors à tue-tête, s’élance dans le ciel, se pose non loin de la femelle et s’approche d’elle peut à peu, jusqu’à ce qu’elle consente à l’accouplement. Dès lors, le couple s’affaire à la construction ou à la réparation de son nid.

Pour cela, les hirondelles utilisent de la boue prélevée au bord des flaques d’eau. Elles se servent de leur bec comme d’une tutelle pour confectionner le nid, glissant sans cesse dans la terre des brindilles qui renforcent la structure. Huit à dix jours de travail incessant sont nécessaires aux deux maçons pour transporter les matériaux et bâtir l’édifice. Le nid, très solide, sera utilisé plusieurs années de suite, moyennant quelques réparations à chaque printemps.

Infatigables parents
Une fois que le nid est bâti, et pourvu d’un peu de duvet pour le confort, la femelle pond entre 4 et 6 œufs. Elle les couvera seule, durant 14 à 18 jours, ne les quittant que brièvement pour se nourrir. C’est vers la fin mai qu’ont lieu les éclosions. Les poussins sond nidicoles : ils naissent aveugles, à peine couverts de duvet, ne pesant guère plus de 2 grammes…Pourvus d’un grand bec jaune pâle, ils sont pourtant capables de briser seuls leur coquille. Moins d’une heure après l’éclosion, ils reçoivent leur première becquée, et pour les parents, c’est le début d’un épuisant ballet…

Le spectacle offert par les hirondelles durant les trois semaines d’élevage des jeunes est celui d’incessantes allées et venues en quête de nourriture. En quinze jours, le poids de chaque poussin est multiplié par dix : les parents chassent à un rythme effréné : les petits, postés au fond du nid, poussent des piaillements déchirants et ouvrent démesurément leur bec. Visibles dans l’obscurité, le palais et les bourrelets des commissures, d’un jaune vif, invitent l’adulte à nourrir.

Des jeunes affamés
À chaque voyage, le parent régurgite une pelote formée d’insectes et la fourre dans le bec du plus affamé, avant de s’envoler de nouveau.  Des observateurs ont noté qu’un oiseau adulte peut effectuer de 115 à 200 nourrissages par jour, transportant en tout 7 grammes d’insectes, soit environ 7000 proies.

Les premiers jours, le mâle se charge seul du nourrissage, la femelle demeurant au nid pour couver ses petits. À partir du 5 jours, les oisillons n’ont plus besoin d’être réchauffés en permanence, le mâle et la femelle se relaient dès lors pour la chasse aux insectes. À 12 jours, les plumes sont sorties et les jeunes ne sont plus couvés du tout. À environ 21 jours, ils sont prêts à l’envol…

La plupart des couples auront le temps d’effectuer une deuxiè_me ponte et d’élever une autre nichée avant la fin de la saison, quelques-uns arrivant même à trois nichées ![ /wps_accordion_item]

Chasser en plein vol
Les allées et venues des hirondelles sont un spectacle de haut vol. Dans un rayon de 500 mètres autour du nid, elles accomplissent dans leur chasse aux insectes de véritables acrobaties aériennes : revirements brusques, piqués, rase-mottes, loopings et arabesques, la queue déployée servant de gouvernail. Le bec aplati s’ouvre très largement pour gober les insectes en vol. Il est bordé de vibrisses, des plumes filamenteuses qui aident à la prise des proies. L’hirondelle chasse à moins de 7 à 8 mètres du sol, de sorte que l’on peut admirer sans peine ses figures et les reflets miroitants de son plumage.

Au-dessus des prairies et des prés, elle happe sauterelles, pucerons, syrphes, tipules et toutes sortes de coléoptères et de papillons : au-dessus des mares et des rivières, elle rase l’eau pour attraper des moustiques, des éphémères, des phryganes, des libellules ou des chironomes.  Aux abords des habitations, mouches, fourmis volantes et araignées s’ajoutent à la liste… Par beau temps, la chasse aux insectes est bonne, pourvu qu’il n’y ait pas de sécheresse excessive. Mais en cas de mauvais temps, les gros insectes volent moins, les petits sont rabattus vers le sol. Les hirondelles chassent alors en vol glissé, près du sol et souvent au-dessus des plans d’eau qui concentrent les insectes, évitant battements d’ailes pour économiser leur énergie.

Le grand voyage
À la fin de l’été, l’élevage des dernières nichées touche à sa fin, et les oiseaux abandonnent leur nid. Les insectes sont encore nombreux, mais les hirondelles n’attendront pas qu’ils deviennent rares. Elles chassent avec frénésie, accumulant des forces pour leur prochain départ. Certaines augmentent leur poids de plus de la moitié !

Au mois de septembre, elles se rassemblent en « dortoir ». Par centaines, elles se perchent dans les roselières ou su des fils électriques pour la nuit. Leur nombre les protège des prédateurs nocturnes, l’alerte étant vite donnée. Les jeunes se mêlent aux adultes, ils sont désormais autonomes et capables d’affronter le voyage.

Puis un matin, suivant on ne sait quel signal, elles ont disparu. La plupart des hirondelles parcourent environ 6 000 kilomètres pour rejoindre leur quartier d’hiver. Celles qui nichent en France hivernent principalement en Afrique tropicale et équatoriale (Sénégal, Guinée, Libéria, Côte d’Ivoire). Au-dessus des terres elles accomplissent 200 à 300 km par jour, faisant halte en dortoir. Mais elles rencontrent bientôt une formidable épreuve : la traversée de la Méditerranée, 600 km d’une seule traite à environ 40 km/h, soit 15 heures de vol sans interruption !

Au cours de cette traversée, une tempête ou un coup de fatigue entraînent la chute et la noyade. Beaucoup d’hirondelles meurent, notamment les jeunes oiseaux. Celles qui parviennent sur les côtes africaines ont encore 3000 ou 4000 km à parcourir, dont près de la moitié au-dessus du désert.

Accordion Item
Pour les plus rapides, le voyage n’aura duré qu’un mois. Arrivés à destination, les hirondelles se refont une santé en se nourrissant d’insectes, abondants sous les tropiques. Au cours de l’hiver, leur robe miroitante perd de son éclat : c’est durant cette saison qu’elles accomplissent leur mues, renouvelant entièrement leur plumage en quelques mois.

Elles sont alors plus ternes. À partir du 15 janvier, les hirondelles repartent. Après avoir affronté les mêmes dangers, les premières abordent l’Europe vers le 15 février, parfois même avant, et remontent vers le nord en suivant l’avancée du printemps.

Identification
  • Nom commun : hirondelle rustique ou hirondelle de cheminée.
  • Nom scientifique : Hirundo rustica.
  • Famille : Hirundinidés.
  • Taille : 18 cm.
  • Poids : 18-20 g.
  • Nombre d’espèces : 79 .
  • Habitat : pays tempérés à la belle saison, régions tropicales en hiver, champs cultivés, jardins, eaux douces.
  • Régime alimentaire : insectivore.
  • Reproduction : niche entre avril et juillet, 2 parfois 3 pontes, de 4 à 5 œufs en moyenne.
  • Observation : d’avril à octobre.
  • Distribution : Eurasie, sauf nord de la Sibérie, Inde, Birmanie, Thaïlande, extrême nord de l’Afrique, Amérique du Nord sauf Floride et extrême nord du Canada.

Lors des migrations, les hirondelles se déplacent en bandes, le long des côtes. Certains endroits, comme le littoral de l’Aude, où elles doivent passer pour éviter les Pyrénées, ou le cap Corse, offrent un spectacle unique : en avril, des hirondelles filent vers le nord tout le long du jour, frôlant la terre et bravant le vent. A la mi-septembre, pour le retour, elles suivent le même chemin en sens inverse.