Le petit-duc scops, veilleur du printemps

Le jour, on le distingue à grand-peine, raide comme une branche le long d’un tronc, incroyablement mimétique dans son plumage d’écorce soyeuse. Si petit, un hibou ! C’en est pourtant bien un, majestueux nocturne à la tête pivotante, aux grands yeux fixes, à l’allure grave. L’obscurité venue, il signale sa présence d’une note flûtée, et seul le silence, revenu pour un moment, laisse deviner sa course aux papillons de nuit.

Un nicheur tardif
À la mi-mars dans le midi de la France, mais entre mi-avril et mi-mai plus au Nord, retentissent les premiers chants. Le mâle lance ses appels mélancoliques, et une femelle des alentours lui répond. Encouragé par ce duo, le petit-duc se poste alors à l’entrée d’une cavité propice à l’installation du nid et poursuit son récital jusqu’à ce que la femelle l’y rejoigne et se mette à gratter vigoureusement le trou. Ce rituel se reproduit plusieurs fois par nuit d’affilée, et dans plusieurs cavités différentes…

La femelle, enfin, montrera son choix en s’installant dans un nid pour son repos diurne. La formation du couple passe aussi par des offrandes de nourriture et lissages de plumes du mâle, très attentionné, à la femelle. C’est vers la mi-mai qu’a lieu la première ponte, l’une des plus tardives parmi les rapaces nocturnes. Dès lors qu’elle est au nid, la femelle ne le quitte plus qu’une fois par nuit. C’est le mâle qui lui apportera sa nourriture durant toute l’incubation, et jusqu’à environ 18 jours après l’éclosion, tandis qu’elle réchauffe les oisillons.

Sauterelles et papillons
Dès le crépuscule, et même encore en plein jour lorsqu’il nourrit ses jeunes, le scops se met en chasse : l’oiseau se penche et attend, en posture ducale, que les proies affairées s’offrent à sa vue et à son ouïe. Le prédateur prend alors son essor. Il plonge pour agripper une sauterelle dans ses serres, ou s’élance en une courte poursuite aérienne pour capturer un papillon de nuit. Quelle qu’ellle soit, la proie sera ensuite consommée au perchoir, ou rapportée au nid. La chasse est particulièrement intense en début de soirée, et s’achève vers 3 ou 4 h du matin. Le petit-duc chasse parfois à pied : posé dans l’herbe, il arpente un coin de prairie et pique des invertébrés du bec, allant parfois jusqu’à extraire un lombric à la manière d’une poule.

Les petits petits-ducs
3 à 6 œufs sont pondus à intervalle de deux ou trois jours, sur la litière naturelle de la cavité, faite de débris de bois et de feuilles, où la femelle couve durant environ 25 jours. Après éclosion, elle les petits hiboux au chaud et leur distribue les proies rapportées par le mâle. Celui-ci vient jusqu’à 90 fois chaque nuit, avec un ravitaillement toutes les 3 minutes en début de soirée, s’espaçant plus tard quand l’appétit des jeunes est quelque peu apaisé.

Après environ 15 jours, la femelle contribue elle aussi au nourrissage. Les petits couverts d’un duvet blanchâtre où apparaissent déjà quelques plumes, se bousculent alors à l’entrée du nid. Vers l’âge de 21 jours, les parents apportent un peu moins de nourriture et tiennent à quelque distance. D’un discret roulement de gorge – drrr,drrr…-, ils encouragent les jeunes à quitter le nid. Dès lors, s’élançant en sautillant d’une branche à l’autre, les jeunes stationnent hirs du nid, où nourrissage et éducation se poursuivent jusqu’à l’âge de 4 ou 5 semaines. Il semble que la famille reste unie pour la migration.

Un grand voyage
Fin août ou courant septembre, c’est le départ. Certains petits-ducs s’arrêtent au sud de l’Espagne ou de l’Italie, en Grèce ou en Crète et y séjournent pour l’hiver, mais la plupart sont des migrateurs au long cours. Leur voyage s’effectue sur un large front, traversant la Méditerranée puis le Sahara.

Les nicheurs d’Europe du Sud et centrale, de Sibérie centrale et de Mongolie, du Moyen-Orient et du sud de l’Asie central accomplissent de grands trajets. Ils rejoignent les savanes d’Afrique tropicale, du Sénégal à l’Ethiopie et au Kenya. Dans ces régions, les sous-espèces de notre continent se mêlent à la race senegalensis, sédentaire : il est bien difficile de les distinguer. Durant l’hivernage, les oiseaux demeurent des chasseurs solitaires, mais pour le repos diurne, ils adoptent des mœurs plus sociales, se dissimulant à plusieurs dans les arbres à feuillage dense…En dehors de cris d’alarmes éventuels, ils sont alors silencieux : le chant du petit-duc est l’apanage du printemps.

Identification
  • Nom commun : petit-duc scops ou hibou petit-duc.
  • Nom scientifique : Otus scops.
  • Ordre : Strigiformes.
  • Famille : Strigidés.
  • Taille : 20 cm.
  • Poids : de 80 à 100 g.
  • Nombre d’espèces : 16 espèces de chouettes et hiboux (Strigidés) en Europe, auxquels s’ajoute la chouette effraie (Tytonidé).
  • Habitat : campagne cultivée avec plantations (vergers, oliveraies), jardins, allées de vieux arbres aux abords des villes et villages.
  • Régime alimentaire : principalement des insectes de bonne taille ; plus rarement des lézards, des rongeurs et des petits oiseaux.
  • Reproduction : ponte en mai, 3 à 6 œufs couvés durant 25 à 28 jours ; les jeunes séjournent 3 semaines au nid (premier envol à 4-5 semaines).
  • Observation : difficile, l’oiseau étant strictement nocturne…
  • Distribution : niche dans le sud de l’Europe, jusqu’en Asie centrale, et dans les régions littorales d’Afrique du Nord ; hiverne en Afrique tropicale.